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zumeurs...
1 mars 2011

Du repos


De la Brièveté de… la vie !
 
Crayon

  1. Entendez les paroles qui échappent aux hommes les plus puissants, les plus élevés en dignité; ils désirent le repos, ils vantent ses douceurs, ils le mettent au-dessus de tous les autres biens dont ils jouissent, ils n’aspirent qu’à descendre du faîte des grandeurs, pourvu qu’ils puissent le faire sans danger; car bien que rien au dehors ne l’attaque ni ne l’ébranle, la fortune est sujette à s’écrouler sur elle-même.
  2. Le divin Auguste, à qui les dieux avaient plus accordé qu’à tout autre mortel, ne cessa de réclamer pour soi le repos et de souhaiter d’être délivré des soins du gouvernement.Dans tous ses discours il en revenait toujours à ce point qu’il espérait pour lui le repos. Au milieu de ses travaux il trouvait pour les alléger une consolation illusoire, mais douce toutefois, en se disant : Quelque jour je vivrai pour moi.
  3. Dans une de ses lettres, adressée au sénat, où il assurait que son repos, ne manquerait point de dignité, et ne démentirait point sa gloire, j’ai remarqué ces mots : " Mais de tels projets sont plus beaux à réaliser qu’en spéculation. Cependant mon impatience de voir arriver un moment si passionnément désiré, me procure du moins cet avantage, que puisque ce bien se fait encore attendre, j’en goûte d’avance les douceurs par le seul plaisir d’en parler."
  4. Combien faut-il que le repos lui parût précieux, puisqu’à défaut de la réalité, il en voulait jouir en imagination !Celui qui voyait tout soumis a son unique volonté, qui tenait en ses mains les destinées des hommes et des nations, envisageait avec joie le jour où il pourrait se dépouiller de toute sa grandeur.
  5. L’expérience lui avait prouvé combien ces biens dont l’éclat remplissait toute la terre, coûtaient de sueurs, et combien ils cachaient d’inquiétudes secrètes.Forcé de combattre à main armée d’abord ses concitoyens, ensuite ses collègues, enfin ses parents, il versa des flots de sang sur terre et sur mer ; entraîné par la guerre en Macédoine , en Sicile, en Egypte, en Syrie et en Asie, et presque sur tous les rivages, il dirigea contre les étrangers du dehors ses armées lassées de massacrer des Romains.Tandis qu’il pacifie les Alpes, et dompte des ennemis incorporés à l’empire dont ils troublaient la paix, tandis qu’il en recule les limites au delà du Rhin, de l’Euphrate et du Danube, dans Rome même, les poignards des Muréna, des Cépion, des Lépide, des Egnatius s’aiguisaient contre lui.
  6. À peine est-il échappé à leurs embûches que sa fille et tant de jeunes patriciens, liés par l’adultère comme par un serment solennel, épouvantent sa vieillesse fatiguée, et lui font craindre pis qu’une nouvelle Cléopâtre avec un autre Antoine.Avait-il amputé ces plaies avec, les membres mêmes, d’autres renaissaient à l’instant. Ainsi dans un corps trop chargé de sang, toujours quelque épanchement s’opère. Auguste désirait donc le repos : dans cet espoir, dans cette pensée, il trouvait l’allégement de ses travaux. Tel était le vœu de celui qui pouvait combler les vœux de tout l’univers.

Sénèque — De la Brièveté de la vie — IV

Commentaire fruste et rustique : la vie est trop courte pour se laisser emmerder par les emmerdes et les emmerdeurs : tracas, soucis, vraies gloires ou fausses gloires, tout n’est que vanité.


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