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zumeurs...
7 novembre 2010

Des sous !


Une nouvelle… monnaie !
 
PasDeuxSous

Bien que M. Doumer [1] éprouve une vive répugnance à parler de son métier pendant les repas, il voulut bien cependant – parce que c’était moi – répondre à ma question.
– Pourquoi, mon cher ministre, lui avais-je demandé, cette obstination des Finances à ne point admettre l’emploi du nickel dans la fabrication des pièces divisionnaires ?
– Mon Dieu ! fit M. Doumer en reprenant des tripes, je vous dirai que j’ignore les raisons de mes prédécesseurs. Quant à moi, ma posture en la question est bien simple : non seulement je n’adopte pas le nickel, mais encore je suis disposé à supprimer l’or, l’argent et le cuivre.
– Allons donc !
– C’est comme j’ai l’honneur de vous le dire.
– Et par quels autres métaux remplacerez-vous ceux-là ?
– Par aucun métal. Toutes les pièces, depuis celles de 100 francs jusqu’à celles de 1 centime, seront en celluloïd.
– En celluloïd !
– Parfaitement.
– Mais vous n’y pensez pas, ma vieille Excellence ! Le celluloïd est une matière sans valeur intrinsèque.
– Et le papier, jeune homme, a-t-il une valeur intrinsèque ?
– Pardon…
– Essayez de déchirer un paquet de billets de mille francs en petits morceaux et de vendre les débris à un chiffonnier, vous verrez ce qu’il vous en donnera, de votre intrinsèque.
– Ça n’est pas la même chose…
– Fondez en un seul lingot 10 francs de sous et vendez-les à un marchand, vous en trouverez 1  franc à peine.
– Oui, mais…
– Et l’argent donc !
– L’argent, oui, je sais…
– Et l’or ! Croyez-vous que si on trouve en Afrique ou en Australie seulement le quart de tout ce qu’on annonce dans les prospectus, la valeur de l’or ne va pas terriblement baisser ? Voyez-vous d’ici l’or à cent sous la livre ?
Il n’y avait rien à répliquer, M. Doumer était dans le vrai.
Avec une obligeance infinie et une urbanité dont je tiens à le remercier ici, publiquement, au nom des Lettres françaises, notre sympathique ministre me développa le nouveau système qui allait permettre à la France de reprendre enfin son rang à la tête des nations.
Une objection me vint, que je croyais définitive :
– Le celluloïd, cher ami, n’est-il point bien inflammable pour un tel emploi ?
– Celui de l’industrie, oui ; mais le nôtre sera rigoureusement incombustible.
– Vous avez trouvé un truc ?
– Oh ! un truc bien simple : nous le ferons fabriquer par la Régie !

[1] Quantum mutatus ab illo… !

Via Alphonse Allai.


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