Conte stupide
Conte… à la moralité douteuse !
Il était une fois, dans le même pays lointain que tous les autres
contes de fées, un petit village d’à peine trente-deux habitants. En
fait, ils étaient encore cinquante-six une année plus tôt, mais il y
avait eu une épidémie de grippe … entre temps. Ce petit village
s’appelait
Sainte-Marie-Mère-de-Dieu-de-l’île-aux-mouettes-albinos-et-unijambistes-sur-mer
(et oui, c’était un trou).
Dans ce joli petit village vivait une petite fille appelée Thérèse. Et
en plus, cette petite fille avait une grand-mère. Tous les jeudi
après-midi, Thérèse allait faire l’épicerie pour sa grand-mère adorée.
Pour se faire, elle devait traverser une charmante forêt, parce que
quelqu’un avait un jour eu la brillante idée de construire un village
perdu dans les bois.
Un jour, qui par un heureux hasard se trouvait être un jeudi, Thérèse
partit gambader joyeusement dans les bois avec son sac à dos, la liste
d’épicerie, et un panier (parce que IGA ne faisait pas encore de sacs
réutilisables et que IGA n’existait pas encore de toute façon).
Malheureusement, le joli petit sentier qu’elle empruntait
habituellement était barré parce que l’idiot du village avait
“accidentellement” balancé de la nitro en plein milieu et qu’il n’y
avait maintenant plus qu’un trou. Elle fut donc obligée de prendre un
autre chemin (logique), et le seul autre qui menait à la même
destination était, pour une raison obscure, sombre, sinistre,
silencieux, et tout plein d’autres adjectifs commençant par S. Mais
Thérèse n’avait guère le choix. Elle s’y engagea donc naïvement,
convaincue que rien ne pourrait lui arriver en plein jour. Elle en
était d’ailleurs tellement convaincue et enthousiaste qu’elle se mit à
chanter. Tous les animaux, oiseaux et insectes situés dans un rayon de
trois kilomètres s’enfuirent de peur. Même certains arbres se
déracinèrent et coururent dans la direction opposée. Faut dire qu’elle
n’était pas particulièrement douée, la petite.
Après trois heures de joyeux gambadage, Thérèse était perdue. Mais,
comme par hasard, se trouvait à proximité une minuscule maison à la
décoration douteuse, ou plutôt très très originale. Bref, c’était laid.
Un cruel dilemme s’imposait maintenant à la pauvre petite fille. Dans
une ultime tentative de solution, elle sortit une pièce de 25¢ de son
sac à dos Pikatchu tm.
“Pile, j’entre et je demande mon chemin, face, j’me démerde toute
seule.”
Naturellement, cela tomba sur face. Thérèse, qui n’avait pas envie et
qui n’était pas capable de se débrouiller, recommença un certain nombre
de fois avant que, finalement, la pièce tombe sur pile. Personne de
normal n’aurait osé pénétrer dans un tel taudis. Mais jusqu’à
maintenant, la jeune fille n’avait pas vraiment brillé par son
intelligence. Elle entra donc dans la demeure, qui était vide. À peine
avait-elle eu le temps de grimacer devant la laideur de l’endroit
qu’une poêle en inox non-identifiée s’abattit gracieusement sur sa
tête. Visiblement, le ou les habitants des lieux ne souhaitaient pas
avoir de compagnie. D’ailleurs, la sinistre silhouette encapuchonnée
qui s’approchait d’elle pour récupérer sa poêle ne semblait pas
particulièrement pacifique.
À la lueur des chandelles que personne n’avait remarqué et qui étaient
là juste pour créer une ambiance “mystérieuse”, Thérèse vit le visage
de cette non moins mystérieuse personne, et en resta stupéfiée.
“Grand-Mère ??!”
Personnellement, je n’ai jamais vu sa grand-mère, mais soit cette
gamine était vraiment aveugle, soit sa grand-mère était vachement
moche, car c’était le chasseur qui se tenait devant elle. C’était un
homme cruel et d’un sadisme incomparable connut sous le pseudonyme
terrifiant de “Tonton Danny”. Il passait ses journées à pourchasser les
pauvres et innocentes créatures vivant dans la forêt. De ce fait,
personne ne l’aimait et c’est pourquoi il vivait tout seul comme
l’aigri qu’il était.
Mais comme Thérèse était une pauvre et surtout innocente créature, elle
s’enfuit aussitôt. Le chasseur la poursuivit, alors elle sortit son kit
de survie en forêt, composé d’une corde, d’une brocheuse, du produit
anti-limace, du cyanure, un paratonnerre,
l’arc-de-Legolas-qui-ne-rate-jamais-sa-cible
autographié, un canif
multi-fonctions, trois objets magiques, et un sandwich
banane-mayonnaise.
Mais juste comme elle venait de finir de sortir tout ça, Tonton Danny,
le chasseur meurtrier qui la pourchassait, s’enfargea dans une branche
qui trainait par là, et tomba dans un trou qui trainait également par
là (note à moi-même : trouver quelqu’un pour faire le ménage). Il
tombait, et tombait, et tombait encore. Faut dire que le trou était
vachement profond.
Thérèse, alors débarrassée de la principale menace qui la menaçait,
continua son chemin. Après deux heures de -un peu moins- joyeux
gambadage, elle était encore et définitivement perdue. C’est alors que,
toujours par hasard, elle arriva à un panneau qui indiquait
“Sainte-Marie-Mère-de-Dieu-de-l’île-aux-mouettes-albinos-et-unijambistes-sur-mer
NORD” avec une flèche vers la gauche, et
“Sainte-Marie-Mère-de-Dieu-de-l’île-aux-mouettes-albinos-et-unijambistes-sur-mer
SUD” avec une flèche vers la droite. Thérèse, qui était vraiment
cruche, ne savait évidemment pas si elle venait du nord ou du sud. Un
autre cruel dilemme qu’elle s’apprêtait à trancher à grand coup de pile
ou face. Mais à peine avait-elle sortit une pièce qu’elle aperçu, en
minuscules caractères gravés dans le plastique bon marché de la
pancarte, une inscription disant “Par ici c’est sans danger”.
Elle prit le chemin indiqué, arriva à l’épicerie, fit ce qu’elle avait
à faire, mangea son sandwich banane-mayonnaise, et retourna dans son
village natal. Elle ne rencontra pas de prince charmant, ne vécut guère
heureuse et n’eut pas de n′enfants car elle tomba dans le trou en
rentrant chez elle.
Fin — Via La passion des poèmes !